7-14 Juin 1975 • Michel Etienne, Jean Verger
L’aggravation de la crise économique et sociale est très nette et les mesures gouvernementales proposées ne réduiront pas le chômage. Le gouvernement Chirac propose de réduire la durée du travail par l’abaissement de l’âge de la retraite et par la diminution du temps de travail et favorise l’extension du travail partiel. Enfin il diminue les offres d’emploi en allongeant la scolarité ou la formation des jeunes à la recherche d’un premier emploi. Ces palliatifs ne visent qu’à réduire la demande d’emploi mais ne résolvent pas le problème du chômage. Le gouvernement n’agit pas au niveau des causes mais à celui de ses effets. Il voudrait lutter contre l’inflation mais ne se pose pas la question d’investir pour développer de nouvelles industries. Les mesures de Fourcade, Ministre de l’Economie et des Finances, vont accroître les difficultés de la petite entreprise et hâter la concentration des secteurs d’activité que le capitalisme français veut privilégier pour sortir de la crise. Trois ouvrages sur l’analyse de la crise par Jacques Attali, Michel Bosquet et une oeuvre conjointe de Samir Amin, A.Faire, Mahamoud Hussein et Gustave Massiah, sont présentés dans l’article de Tribune Socialiste.
La crise économique se renforce à l’échelle internationale et française. Le PSU, dès son Congrès d’ Amiens a imaginé la stratégie d’une riposte politique cohérente centrée sur l’emploi et la consommation pour faire face aux effets de cette crise. A ce sujet, le séminaire organisé par les camarades italiens du Partito di Unita Proletaria per el Communismo (PDUP) les 8 et 9 février derniers à Rome a confirmé la nécessité de la bataille de l’emploi face à l’austérité. Si la situation n’est pas tout à fait la même en Italie et en France, il n’en demeure pas moins que le moyen privilégié pour restructurer la classe ouvrière est celui du travail pour tous. Les luttes d’auto-réduction, principe qui vise à faire baisser les prix collectivement du gaz ou de l’électricité, des transports ou des loyers, permettent d’affirmer la priorité de la valeur d’usage des biens sur la valeur d’échange. Cette lutte est par ailleurs un instrument de la réussite de l’alliance entre les classes moyennes et la classe ouvrière. Le PSU propose deux axes de lutte : opposer à la restructuration du capitalisme, la restructuration de la classe ouvrière en s’attaquant au chômage, et diminuer le temps de travail pour offrir du travail à tous.
19-25 Janvier 1975 • Propos recueillis par Jean Verger
René-Victor Pilhes écrit le roman d’une multinationale dans un monde qui bascule et qui tombe dans le fascisme : « L’imprécateur ». Roman, fiction, ou réalité prémonitoire, analyse politique ou encore cri militant, c’est ce que révèle l’entretien avec l’auteur qui définit son roman comme un cri instinctif. Militant contre la guerre d’Algérie, mendesiste puis au PSA et ensuite au PSU, René-Victor Pilhes militant C.G.T a créé une section PSU d’entreprise et connait la réalité du terrain. Pour l’auteur, aujourd’hui, le chômage, le chaos, la faillite se traduiront par la destruction des institutions bourgeoises et des libertés démocratiques. Face à la crise, aux bouleversements consécutifs, à la hausse des matières premières, les capitalistes ne resteront pas inactifs. Des mesures impopulaires seront prises par les gouvernements occidentaux avec leurs conséquences. Au travers de son roman il démonte le système de production capitaliste et pense que la révolution socialiste ne peut être que populaire. Pour lui, la crise économique entrainera une redistribution des cartes sur le plan politique et ceux qui sont partisans de la démocratie vont souffrir. Il ajoute que les révolutionnaires doivent intégrer dans leur démarche l’ensemble du monde dans une dimension politique et culturelle.
La division impérialiste du travail est au coeur de la réflexion sur la crise sociale et économique de 1973-1975. Les premiers signes de la crise apparaissent dès les premières années de la décennie soixante. La transformation de la manière de produire repose sur des industries motrices centrées sur des biens durables de consommation, en particulier l’automobile. Le développement de ces industries et de celles qui en dépendent (pétrole et chimie) implique une transformation de la production non seulement aux Etats-Unis mais aussi en Europe. Les bouleversements de la production vont engendrer de nouvelles formes d’entreprises et de management, le seul but étant d’obtenir les conditions d’exploitation de la force de travail les plus favorables au profit. Les travailleurs résistent et pour répondre à cette résistance la bourgeoisie va accroître les divisions au sein des travailleurs à un niveau international. Aux augmentations de salaire que le capital devra concéder, la réponse sera l’intensification de l’utilisation de la force de travail. Le rapport salaire-prix est modifié, l’inflation se généralise et apparaît comme constitutive du développement du capital.