Frédo Krumnov vient de publier « CFDT au coeur » dans lequel il explique que le but de l’orientation autogestionnaire est de faire prendre en charge par les travailleurs leur destin. Il ne s’agit pas d’aller vers une plus grande participation des travailleurs au niveau des différentes instances de gestion, mais d’un transfert total du pouvoir de la propriété privée, de la bureaucratie et de la technocratie, à la collectivité de base des travailleurs. Il s’agit pour la collectivité des travailleurs de se donner pour commencer les structures qu’elle imagine elle-même et qu’elle trouve les plus adaptées à une prise en charge collective pour une meilleure expression démocratique. Ce qui est important pour une organisation syndicale c’est de ne pas laisser tout cela au hasard de la spontanéité mais au contraire d’incorporer cet objectif dans sa stratégie. Par ailleurs, une stratégie de prise de pouvoir ouvrier par l’action de masse pourrait provoquer le déséquilibre fatal au pouvoir capitaliste de l’Etat et des patrons, et faire avancer des objectifs allant nettement dans le sens d’une société socialiste autogérée.
Utopie. Autogestion. Une telle association peut sembler bien provocatrice… surtout à quelques mois des états généraux pour l’autogestion socialiste décidés par le P.S.U. Pourtant ce sont les idées les plus utopiques qui ont fait avancer l’organisation de la société, la science ou encore la politique. Marion Lay dans son article cite Victor Fay : « « L’idée de l’autogestion hante depuis longtemps les travailleurs, c’est un projet qui remonte des profondeurs de la conscience populaire chaque fois que les masses se mettent en mouvement… Elles incorporent dans ce projet grandiose une part de rêve ; il importe donc d’en dégager ce qu’il y a de rationnel de ce qui ressort de l’imaginaire. » L’utopie de l’autogestion c’est l’utopie de la liberté lorsqu’elle prend conscience de tous ses moyens, au contraire de la bureaucratie qui est l’interdiction de l’utopie. Il s’agit donc d’intégrer cet imaginaire collectif dans le concret pour pouvoir vivre autre chose dans une société bourgeoise lissée, sans rêve donc sans avenir.
Lors de son dernier Conseil national de novembre, le PSU a décidé de réunir des états généraux pour l’autogestion socialiste. Ces états généraux sont fixés au 3 et 4 Juillet 1976. Ceux-ci s’adressent à tous ceux qui s’interrogent sur les conditions qui permettront de construire une société socialiste pleinement libératrice. A ceux qui participent à des luttes pour le contrôle collectif des conditions de vie, dans la perspective du pouvoir populaire. Le PSU ouvre largement ces états généraux pour confronter les expériences, les acquis et les projets. Il entend contribuer à l’élaboration collective d’une alternative globale pour tous ceux qui contribuent à faire mûrir sa nécessité dans l’action de tous les jours. Il est prévu des forums de discussion, des carrefours et des assemblées générales. Seize thèmes de réflexion ont été mis à l’ordre du jour. Par l’intermédiaire de Tribune Socialiste, le PSU ouvre une tribune aux lecteurs pour qu’ils puissent faire part de leur expériences, réactions et réflexions.
La révolution au Portugal est pour le PSU riche d’enseignement. La Direction Nationale Politique du PSU fait une analyse politique, juste avant les élections du 25 Avril 1976, sur les forces et faiblesses de l’action populaire, politique et syndicale pour imposer au Portugal le socialisme et permettre aux forces de gauche de sauvegarder la défense, le renforcement, l’extension et la coordination des organes populaires de démocratie directe en liaison avec les revendications des travailleurs dans les entreprises et les quartiers.
Les élections du 25 Avril 1976 ont donné une nette majorité à la gauche. Elles montrent que la volonté d’aller vers le socialisme reste dominante au sein du peuple portugais. Mais la division des forces du mouvement ouvrier de la gauche et de l’extrême gauche constitue le principal obstacle à la traduction en acte de cette volonté, face à une droite qui reste menaçante. L’avenir de la révolution portugaise dépend de la capacité qu’auront ceux qui ont été les principaux acteurs à tirer les leçons d’un récent passé, riche d’expériences qui valent également pour tous les militants révolutionnaires.